LATTARA: LA BATAILLE ADMINISTRATIVE


La bataille administrative pour la sauvegarde et l’ exploitation du site archéologique de Lattes entre dans sa seizième année. Je ne me sens plus le droit de ne pas donner à la population de Lattes, qui a montré sa détermination à protéger son patrimoine, des informations sur le comportement négatif de l’ administration.


Dans "Lattes, inépuisable réserve archéologique", j’ ai donné, en 1972, au nom du groupe Painlevé, un historique des découvertes. Il n’ est pas question d’ y revenir, faute de place, dans ce petit article. Disons seulement que nous avons beaucoup progressé, depuis cette date. Assez pour que le Ministère reconnaisse que le gisement est d’ importance nationale. Dans la nuit du 19 Octobre dernier, M. Lecat, Ministre de la Culture, déclarait : " Les Français doivent se sentir propriétaires de leur patrimoine et des actions seront conduites avec un souci d’ ouverture sur les collectivités locales et sur les associations".
Les Lattois n’ ont pas attendu l’ invitation du Ministre pour "se sentir" propriétaires des collections archéologiques déjà exhumées. Ils "sont" propriétaires de ces collections depuis le don du Groupe Painlevé, accepté par le Conseil Municipal. En quoi pourrait se manifester le souci d’ ouverture du Ministère ? Sur deux points importants : le musée, d’ une part, les fouilles, d’ autre part.


Dans une lettre récente, la Direction des Antiquités du Languedoc- Roussillon, 5 bis, Rue Salle l’Evêque à Montpellier, me signifie ses projets, sans aucune concertation. Le Maire de Lattes ne me démentira pas, qui tente depuis des mois, d’obtenir la tenue d’ une table ronde ou toutes les parties intéressées pourraient donner leur avis.


Le programme de la direction est, en gros celui-ci : Règlement définitif de l’achat de la ferme de Saint-Sauveur que, depuis plus de dix ans, je conseille, pour établir un Musée de site. Après plus de trois ans "enclenchement du processus d’ achat", à ma connaissance, l’acte de vente n’est pas encore signé. ensuite, restauration des locaux qu’on a laissé dégrader pendant toutes ces années. Au risque de paraître grincheux ( j’aurais de solides raisons de l’être), je dirai que je ne crois pas à la capacité de l’Administration de trouver, surtout dans les conditions économiques actuelles, des crédits suffisants pour cette tâche, dans des délais raisonnables (un an ou deux?). Dès que l’état des locaux le permettra et que la sécurité sera assurée, on fera de Saint- Sauveur un Dépôt Régional de la Direction des Antiquités, ce qui permettra de caser des collections provenant de toutes sortes de gisement QUI N’ONT RIEN A VOIR AVEC LATTES. On transfèrera les collections de Painlevé qui sont, depuis des années en situation précaire dans diverses classes de Montpellier ou de lattes. une salle ou deux seraient prévues pour faire un"petit" musée local ; quand à la Conservation , il me semble qu’ on s’ achemine vers la nomination d’ un Conservateur départemental à temps partiel.
On le voit, le musée de LATTARA ne verra le jour ni en 1979, ni en ... mais qui oserait proposer une date?

UN GISEMENT QUALIFIÉ DE TROP IMPORTANT"

Pour le deuxième volet, les fouilles sur le terrain, c'est encore plus simples : des dispositions nouvelles demandent aux Directeurs d’ Antiquités de programmer les fouilles de la circonscription, selon des thèmes harmonisés, avec prévisions budgétaires. Si les propositions du Directeur du Languedoc sont agréées, Nages recevra, en 1979, 60000 F, les Terramares (dont je suis l’ inventeur, mais d’autres disposeraient des crédits) 30000 F, Ambrussum 50000 F, Murviel 25000 F... La liste seraient longue qui prévoit d’ alimenter jusqu’à un responsable de chantier qui ne donne pas signe de vie, mais recevra 20000 F !!! Budget prévu pour les fouilles de Lattes, reconnu unanimement, Direction des Antiquités comprises, comme le gisement le plus chargé de promesses, non seulement du Languedoc, mais de toute la France : Zéro franc, Zéro centime. Prétexte avancé par la Direction du Languedoc : gisement trop important pour être attaqué avec des moyens insuffisants. Quand à la définition de ces moyens, ce qu’elle propose est si dérisoire que nous nous tairons par charité.


Mais, diront les lattois, on fouille à lattes. Oui, et la direction des antiquités a même offert une subvention de 5000 F. Elle estime, et elle a raison, que la fouille en cours nous occupera encore longtemps. Mais, administrativement on n’a autorisé cette recherche, refusée par ailleurs depuis des années, que sur un terrain communal, destiné à être perdu pour l’archéologie, situé dans une zone qualifiée par l’administration de "périphérique", ou rien en surface ne promettait quoi que ce soit (il n’y avait que moi pour croire à la présence de couches archéologiques), c’est à dire que cette autorisation n’a rien à voir avec une recherche programmée sur le terrain acquis par l’ÉTAT, LE DEPARTEMENT ET LE DISTRICT DE MONTPELLIER. DEPUIS CETTE ACQUISITION, LE GROUPE PAINLEVÉ ET MOI-MÊME SOMMES EXCLUS DE TOUTE TENTATIVE DE RECHERCHE DANS CE SECTEUR ET TOUTES NOS DEMANDES DE FOUILLES SE HEURTENT À UN NIET SANS APPEL DU CONSEIL SUPERIEUR (SUR AVIS DÉFAVORABLE, IL FAUT LE DIRE DE LA MÊME DIRECTION DES ANTIQUITES).


Or, l’ argent de l’État, du Département, du District provient AUSSI de la poche du contribuable Lattois, sans parler de l’effort direct consenti par la commune. C’ est pourquoi, il me semble, chacun, dans ce village a le droit, oserai-je dire, le devoir de protester en haut lieu, contre le verrouillage administratif du site de Lattes, verrouillage qui est en complète contradiction avec les déclarations de M. Lecat. Ce serait à mon sens, aider notre Maire qui, sur délibération du Conseil Municipal, doit se rendre à Paris pour défendre notre patrimoine local, lequel n’ est ni la chasse gardée, ni la propriété de la seule Direction des Antiquités.

Affaire à suivre..

Henri PRADES, Journal communal de Lattes, Novembre 1978

 

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